Nos actions
Terres en Guil maintient et développe l’activité agricole sur le territoire par trois modes d’action : la préservation et la mise à disposition de foncier, l’aide à l’installation de fermiers et de fermières et l’amélioration de la souveraineté alimentaire du territoire.
Nos fermes, nos terres
Terres en Guil travaille actuellement à l’acquisition de ses premiers biens
Préserver les terres agricoles et la biodiversité
Les terres agricoles et les personnes qui les travaillent sont essentielles à l’alimentation qui arrive dans nos assiettes, à l’entretien du paysage et à la vitalité du territoire… Or, les fermes disparaissent inexorablement : sur le Guillestrois-Queyras, moins de 100 fermes subsistent contre plus de 500 dans les années 1970. Elles sont toujours menacées par l’artificialisation. En zone montagneuse et touristique, les espaces soumis à l’étalement urbain sont aussi ceux à préserver pour l’agriculture : les fonds de vallée où la terre est la plus profonde et la moins pentue. Le maintien de terres agricoles est un enjeu majeur des prochaines décennies : diversité du tissu socio-économique dans ce territoire de montagne et diversité écologique et des paysages.
Par quelles actions Terres en Guil répond-elle à ces enjeux ?
Démarchandiser le foncier agricole
Le foncier acquis par Terres en Guil devient une propriété collective : nos statuts le protègent de la spéculation et renforce sa valeur d’usage. Dans le cas d'une mise à disposition par une commune, c'est la gestion qui restera collective, la commune, oropriétaire, s'engageant à maintenir cette logique. Ainsi les porteurs et porteuses de projets de projets agricoles sont assurées d'une installation durable et de la sécurisation de leur outil de travail.
Retour d'expérience : Anne Chouvet, maire d’Eygliers - intervention Assemblée Générale 2023
" Je suis issue du milieu agricole, j’ai vécu les galères pour trouver du terrain. La mairie d’Eygliers est très sensible à ce problème. On a travaillé avec la SAFER, dans le cadre d’une convention : la SAFER achète des terrains avec les fonds du département, les met en vente et la commune achète les terrains qui n’ont pas trouvé preneur. Mais je me suis rendu compte que certains agriculteurs avaient acheté des terrains, les avaient gardés dix ans, puis étaient sortis de l’activité agricole. Je ne suis donc plus favorable à vendre les terrains aux agriculteurs car c’est courir le risque que, privatisés, ils perdent leur vocation agricole. Finalement, Terres en Guil, que je regardais un peu avec curiosité, ça nous sert vraiment à quelque chose d'important : que les parcelles servent toujours à l’agriculture. C’est le chaînon manquant pour préserver les terres agricoles."
Mettre en valeur des terres sous-exploitées et lutter contre l’enfrichement de nos paysages
La déprise agricole entraîne une perte de biodiversité, appauvrit les écosystèmes et augmente le risque d’incendie. Elle provoque aussi une perte de la valeur agronomique des terres qui décourage les porteuses et porteurs de projets d'acquérir et de travailler ces parcelles. Les friches sont donc une cible prioritaire pour Terres en Guil, qui nécessite un travail au long cours.
Créer une réserve foncière cohérente et facilement exploitable pour les futures fermières et futurs fermiers
La structure de la propriété foncière est particulièrement morcelée sur le Guillestrois-Queyras. On peut trouver sur un seul hectare quinze origines de propriété, notamment des indivisions : autant de freins pour constituer des structures viables pour une ferme. Terres en Guil travaille à la restructuration parcellaire pour créer une réserve foncière plus cohérente. Ce travail se fait en partenariat avec les AFP* locales quand elles existent.
Préserver la biodiversité par le Bail Rural Environnemental (BRE)
En concluant un BRE, Terres en Guil ajoute des critères environnementaux à l’utilisation de son foncier. Il existe 16 clauses pouvant être intégrées dans un BRE, notamment la protection d’infrastructures écologiques (un arbre isolé, une mare, un bosquet, une haie, un fossé…), la limitation ou l'interdiction des apports en fertilisants et en produits phytosanitaires, le contrôle de l'assolement et des techniques de travail du sol, les pratiques d'agroforesterie...
Favoriser le maintien et l’installation de paysannes et de paysans
Alors que les fermes sont moins nombreuses et que les départs à la retraite des agricultrices et agriculteurs s’accélèrent, l’accès à la terre est toujours plus difficile. Convoité pour d’autres usages, le foncier agricole est rare et cher, ce qui le rend inaccessible pour les candidates et candidats à l’installation hors cadre familial, de plus en plus nombreux. Pour s’installer en agriculture, trouver des terres ou une ferme est essentiel, mais cette recherche relève du parcours du combattant. C’est pourquoi nous soutenons les porteurs et porteuses de projets dans leur installation.
Les facteurs limitant l’accès à la terre sont multiples.
Le marché du foncier, concurrentiel et spéculatif
Les terres agricoles peuvent être convoitées pour des projets variés, liés à l’agriculture ou non. Pour l’agrandissement de fermes existantes d’une part, mais aussi en vue d’une urbanisation, bénéficiant au passage d’une forte hausse du prix de vente, ceci malgré le contrôle existant (Safer, documents d’urbanisme...). Les transactions foncières visant de nouvelles installations sont donc rares !
Le statut du fermage peu attractif pour les bailleurs
Le fermage est un type de bail rural dans lequel le ou la propriétaire, le bailleur, confie à un preneur, la fermière ou le fermier, le soin de cultiver une terre sous contrat. Le contrat de fermage, d'une durée théorique minimale de 9 ans, est très protecteur pour le preneur et peu de propriétaires veulent s’y engager.
La transmission des fermes de plus en plus difficile
Les politiques agricoles ont orienté l’agriculture vers l’agrandissement et la concentration des capitaux et l’ont éloignée de la structure de la ferme familiale. La structuration des fermes issues de ce modèle, de plus en plus grandes et équipées, donc de plus en plus coûteuses, correspondent moins aux attentes actuelles. Ce changement de modèle arrive dans une impasse alors qu’une part importante (60%) des candidates et candidats ne sont pas issus du milieu agricole, et ne peuvent pas assumer l'acquisition de telles fermes. Elles sont alors intransmissibles : elles sont abandonnées ou incorporées à une ferme voisine, ce qui aggrave le problème.
Terres en Guil favorise l’installation, grâce à sa structuration innovante en SCIC :
Lever des fonds pour l’acquisition de terres
La SCIC permet aux personnes physiques et morales (collectivités publiques, structures privées) d’abonder au capital lors des levées de fonds et de contribuer ainsi collectivement à l’acquisition de foncier, bâti ou non bâti. Ainsi maîtrisé, celui-ci est mis au profit de nouvelles installations dans le cadre d’un bail rural environnemental (BRE).
Accompagner les transmissions
L’accompagnement des cédants et des porteurs de projets en lien avec les structures compétentes est essentiel pour que les transmissions réussissent. Conseils et accompagnement à la transmission, soutien et appui technique, appui à la recherche de terres et aux candidatures des porteuses et porteurs de projets, nos actions permettent de penser de nombreux cas de figure et de nous adapter à chaque projet.
Favoriser des projets variés
Terres en Guil souhaite permettre l’installation de fermes diverses, tant par leur taille que par leur nature, dans une dynamique de complémentarité et de résilience. De plus, le soutien aux projets de reconversion ou atypiques est important : ils sont souvent dépréciés tout au long du parcours d’installation car ils s’éloignent d’une vision conventionnelle des exploitations agricoles.
Contribuer à la souveraineté alimentaire, locale et solidaire, du territoire
Véritable programme politique, le concept de souveraineté alimentaire est lancé par la Via Campesina en 1996.
« Profit for few or food for all »
(« Le profit pour une minorité ou l’alimentation pour tous »)
Ces mots constituèrent la déclaration finale des ONG, repris la même année par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.
Le mouvement de la souveraineté alimentaire s’établit clairement à travers une reterritorialisation de l’agriculture dont la gouvernance doit redevenir un enjeu démocratique et faire l’objet d’une réappropriation commune. C’est dans cette optique que Terres en Guil se propose d’être, à l’échelle du Guillestrois-Queyras, un maillon de la souveraineté alimentaire.
Reterritorialiser et repolitiser l'alimentation
L’idée de souveraineté alimentaire vient prendre le relais d’une autre notion, la sécurité alimentaire, qui émerge dans les années 1960-70 pour revendiquer l’universalité du droit à l’alimentation. La FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) la définissait ainsi :
« La sécurité alimentaire existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout moment, la possibilité physique, sociale et économique de se procurer une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins et préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. »
Si l’objectif reste le même avec la souveraineté alimentaire, ce sont les moyens d’y parvenir que celle-ci se propose de repenser. Force est en effet de constater que la question de la faim dans le monde ne se résout pas.
Le terme de sécurité alimentaire suppose de produire davantage de nourriture et de la distribuer plus efficacement, il ne pose pas les questions du pouvoir et de la démocratie : qui contrôle l’accès aux ressources ? qui décide de ce qui est cultivé, où et par qui ? La souveraineté alimentaire réintègre ces dimensions essentielles de l’alimentation en la reliant à la nécessité d’une agriculture vivrière locale et écologique.
« Les aliments ne sont plus seulement un simple produit de consommation. Ils sont réintégrés dans les contextes sociaux, écologiques, culturels et locaux et y sont reconnus comme sources de nutrition, comme moyens de subsistance.»
Bulletin Nyéléni n° 30 « Faire progresser le paradigme de la souveraineté alimentaire »
La Déclaration de Nyéléni peut être déclinée sur notre territoire selon ses six axes
La priorité donnée à l’alimentation de la population
Le droit à l’alimentation doit être garanti pour chacune et chacun. Terres en Guil entend participer à l’inflexion nécessaire des politiques alimentaires et agricoles locales à travers la reconquête de terres agricoles pour le territoire, mais également à travers un travail en partenariat avec les structures de l’alimentation du territoire, banques alimentaires notamment.
La valorisation des produits locaux
Par la mise à disposition de terres à des paysan·nes, nous soutenons des productrices et des producteurs ancrés sur le territoire et nous les aidons à mettre en œuvre leur outil de production en leur permettant d’accéder au foncier et d’allouer leurs capitaux à l’exploitation plutôt qu’au foncier.
L’établissement de systèmes locaux de production
Grâce au réseau de partenariats dans lequel est impliquée Terres en Guil, nous travaillons à rapprocher producteur·ices et consommateur·ices et à protéger leurs revenus, conditions de vie et de travail.
Le renforcement de la gouvernance locale
En gérant des terres agricoles qui sont rendues à leur statut de bien commun, Terres en Guil contribue à faire sortir le système agro-alimentaire d’une logique de concurrence pour le diriger vers une logique de solidarité.
La construction des savoirs et savoir-faire
En facilitant l’installation de porteuses et porteurs de projets, nous encourageons les vocations agricoles et nous mettons en partage les connaissances et compétences de ce secteur essentiel. Notre action s’inscrit dans une démarche pédagogique auprès du grand public avec la perspective d’une réappropriation citoyenne des questions alimentaire et agricole.
Le travail avec la nature
À travers l’acquisition collective de foncier, nous cherchons à préserver les terres agricoles et à les vouer à un usage agroécologique ayant pour maître-mot la sauvegarde et le développement de notre biodiversité. Nous dirigeons ainsi nos actions vers une résilience alimentaire qui vient compléter celle de souveraineté au vu des crises écologiques dans lesquelles nous nous enfonçons.